TikTok et addictions numériques : un enjeu de santé publique et professionnel

Version audio
Devenu incontournable chez les adolescents, TikTok soulève des inquiétudes majeures en matière de santé mentale et d’addiction numérique. En septembre 2025, une commission d’enquête parlementaire a présenté un rapport unanime après six mois d’auditions et de consultations citoyennes. Ses conclusions mettent en avant des risques psychologiques, éducatifs et sociaux, qui dépassent le cadre des mineurs et concernent aussi le monde professionnel. De la santé aux assurances, en passant par la banque ou le BTP, l’hyperconnexion est désormais un défi collectif.

TikTok, un phénomène massif mais inquiétant



Avec ses vidéos courtes et son algorithme addictif, TikTok s’est imposé comme le réseau préféré des adolescents. Plus de la moitié des mineurs y passent plus de 2h par jour, selon une consultation citoyenne menée auprès de 30 000 personnes. Ce temps d’écran, souvent excessif, entraîne une perte de sommeil, une baisse de concentration et un sentiment de dépendance difficile à contrôler. Les mécanismes sont bien connus : chaque interaction – visionnage, like, partage – nourrit l’algorithme qui affine sans cesse ses recommandations pour retenir l’utilisateur le plus longtemps possible. Ce processus active les circuits de la récompense dans le cerveau, créant un phénomène de craving, cette envie irrépressible de retourner sur l’application. À cela s’ajoutent le FOMO (Fear Of Missing Out, peur de rater quelque chose) et l’effet de bulle algorithmique : l’adolescent est enfermé dans une chambre d’écho de contenus similaires, qui valident ses goûts ou son mal-être.

Les chiffres sont préoccupants :
• 26 % des jeunes ont vu des contenus choquants,
• 17 % de la nudité,
• 13 % des vidéos liées aux troubles alimentaires
• 8 % des images évoquant le suicide ou l’automutilation.

Autant d’expositions toxiques qui participent à la normalisation de comportements dangereux. L’impact psychologique est mesurable : stress, anxiété, isolement social, symptômes dépressifs. Loin d’être une simple plateforme de divertissement, TikTok concentre les risques les plus visibles de l’hyperconnexion des jeunes.
Article Digital Wellness : TikTok et addictions numériques : un enjeu de santé publique et professionnel

La commission d’enquête parlementaire : 10 mesures fortes pour protéger les mineurs



Face à ces constats, une commission d’enquête parlementaire a été créée en mars 2025 pour étudier les effets psychologiques de TikTok et des réseaux sociaux sur les mineurs. Après 6 mois de travaux, d’auditions et de consultations citoyennes, le rapport a été adopté à l’unanimité. Les députés ont retenu dix recommandations clés qui traduisent une volonté d’appliquer le principe de précaution.

Parmi elles :
• Interdire l’accès aux réseaux sociaux (hors messageries) aux moins de 15 ans ;
• Instaurer un couvre-feu numérique entre 22 h et 8 h pour les 15-18 ans ;
• Interdire l’usage du téléphone portable dans tous les lycées.
Sur le plan technologique, la commission demande de diversifier les contenus proposés, de limiter le scroll infini et de rendre les algorithmes plus transparents, en permettant aux utilisateurs de choisir parmi plusieurs modes de recommandation.
Les sanctions contre les plateformes devraient être renforcées et systématiques en cas de manquements. Le rapport recommande aussi d’introduire une éducation au numérique dès l’école primaire et de déployer des campagnes de sensibilisation massives.
Enfin, 2 points majeurs sont à retenir : l’augmentation des moyens pour la santé mentale, afin de mieux prendre en charge les jeunes, et la redéfinition du statut juridique des plateformes, qui pourraient passer du simple rôle d’hébergeur à celui d’éditeur, impliquant une responsabilité accrue. Ces mesures ambitieuses reflètent une prise de conscience : les mineurs ne sont pas des utilisateurs comme les autres, leur vulnérabilité doit être reconnue et protégée.

Un enjeu qui dépasse les jeunes : tous les secteurs concernés



Si TikTok cristallise les inquiétudes, il n’est que la partie émergée d’un problème plus vaste: l’hyperconnexion touche aujourd’hui tous les âges et tous les secteurs professionnels.

Dans le domaine de la santé, les médecins constatent une hausse des troubles liés aux écrans : anxiété, fatigue cognitive, baisse de l’attention. Les soignants eux-mêmes ne sont pas épargnés par le burn-out numérique.

Côté assurance, les risques psychosociaux, le surendettement lié aux jeux ou aux cryptomonnaies, ou encore la distraction numérique au volant deviennent des enjeux assurantiels majeurs. Les banques, de leur côté, observent des comportements financiers compulsifs comparables aux mécanismes addictifs observés sur TikTok : trading excessif, investissements impulsifs, paris sportifs.

Dans le BTP et le transport routier, l’usage problématique du smartphone accroît le risque d’accidents graves sur les chantiers et sur la route, exposant les employeurs à des conséquences humaines, financières et juridiques. TikTok agit ici comme un révélateur : il illustre comment les technologies numériques, en exploitant nos mécanismes attentionnels, fragilisent la santé mentale et la sécurité de l’ensemble de la société. Il ne s’agit plus seulement de protéger les mineurs, mais de reconnaître que l’addiction numérique est une problématique collective, qui concerne les salariés, les entreprises, les institutions et les familles.

Prévenir plutôt que subir : éducation, entreprises et acteurs spécialisés



La question n’est donc pas de diaboliser TikTok ou d’interdire tous les réseaux sociaux, mais de réfléchir à un usage plus encadré et plus sain du numérique. Plusieurs leviers d’action existent dès aujourd’hui.
Pour les familles : retarder la création d’un compte, limiter le temps d’écran, désactiver les notifications push et encourager le dialogue autour des émotions liées aux usages numériques.
Pour les écoles : intégrer une véritable éducation au numérique dès le primaire, afin de donner aux jeunes les clés de compréhension des mécanismes algorithmiques et des risques associés.
Pour les entreprises : mettre en place des politiques de prévention, former les managers et sensibiliser les collaborateurs à l’hyperconnexion, aux risques psychosociaux et aux distractions numériques.
Enfin, pour les pouvoirs publics : investir dans la santé mentale et s’assurer que les plateformes respectent leurs obligations de protection des usagers.
L’affaire TikTok met en lumière une problématique beaucoup plus large : celle de l’addiction numérique, qui fragilise aussi bien les adolescents que les professionnels. L’équilibre numérique ne peut plus être laissé au hasard ni aux seuls algorithmes des plateformes. Il suppose une mobilisation conjointe des familles, des établissements scolaires, des entreprises et des pouvoirs publics.

Chez Digital Wellness, nous croyons que la prévention est la clé. À travers nos formations, conférences et ateliers pratiques, nous aidons les organisations et les jeunes à mieux comprendre les mécanismes de l’addiction numérique et à adopter des pratiques plus équilibrées.
Protéger les adolescents, c’est aussi protéger la société et le monde du travail. Agir dès aujourd’hui, c’est offrir à chacun les moyens de reprendre le contrôle de son attention, de son bien-être et de son avenir numérique.